TRUST: Fils de lutte (2019)

Quand le taulier de RTJ m’a demandé de chroniquer le dernier TRUST, j’ai d’abord cru à une blague, avant de jeter un œil sur le Net pour constater que le dernier opus du légendaire groupe français se faisait quasi-unanimement descendre chez les fans de la première heure ! Tu parles d’un cadeau…

Bon alors ce « Fils de lutte » ? Titre, visuel (un masque à gaz jaune), un morceau au vitriol contre le Président de la République, tout cela flaire un peu le racolage, mais qu’en est-il à l’écoute ? 

Comme son prédécesseur, il a été enregistré en studio mais avec un son « live », avec à la réalisation le fidèle Madje Malky (qui a bossé entre autres pour Prince) et au mixage Mike Fraser (Aerosmith, Metallica , The Cult et… AC/DC, tiens tiens ), garant de gros son. L’album débute par une intro très calme, mais immédiatement la rythmique se met en marche, lourde et implacable, solo d’acier : «  Portez vos croix » donne le ton, la révolte brûle toujours et le groupe assure.

Sur « Les murs finiront par tomber » les chœurs féminins tant décriés font leur apparition, mais force est de constater qu’ils apportent une couleur nouvelle au vent de rébellion « trustien » (c’est beau non ?) ; si un poids lourd du rock US en faisait autant, on crierait certainement au coup de génie, on applaudirait d’avoir osé. Trust se remet en question musicalement bravo !

« Amer Saheb » (le Commandant Massoud, leader afghan opposé aux extrémistes religieux et assassiné la veille du 11 septembre) offre encore une nouvelle facette musicale, guitares entrelacées, voix de Bernie plus « légère » et toujours ces chœurs, beau solo.

D’ailleurs on constate que Nono n’a rien perdu sur le titre suivant « J’ai cessé de compter », et une très belle intro, avec un beau solo de wah wah. « Miss Univers », attaque frontale contre E. Macron, me semble paradoxalement le titre le moins percutant, dû à un phrasé décalé, aux jeux de mots faciles. Un relent de sonorités sudistes sur « Tendances «  (on est quand même sur RTJ ici), une ambiance blues sur « On va prendre cher » voire boogie sur « C’est pas de m’a faute », encore de beaux solos sur « Delenda », la veine musicale de Trust semble totalement faire référence à un célèbre groupe australien, Bernie confiant « avoir cette fois totalement composé des titres sur lesquels on assume nos influences ». En conclusion, après plusieurs écoutes, cet album qui comporte deux, trois belles réussites, peut surprendre, même dérouter les plus fidèles fans, mais 40 ans après Antisocial, il prouve, dans un registre musical différent, mais tracé dans le même sillon hard –blues, que le groupe est toujours en rébellion, et que sa vision de notre société est toujours aussi juste et corrosive. Et comme il semblerait que pour le prochain opus, ils auraient le projet de travailler avec un orchestre philharmonique, il va falloir faire preuve d’ouverture d’esprit musicale.

Chris MARQUIS